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Claude Debussy 德彪西

(2008-01-16 09:18:16) 下一個


德彪西所處的時代也正是塞尚(Cézanne)和馬拉美(Mallarme)的時代,由這三個巨人組成大樹也可能就是自由和現代藝術的大樹。-----------

Pierre Boulez

德彪西(全名:阿希爾·克洛德·德彪西,Achille-Claude Debussy,1862~1918)法國作曲家,音樂評論家,

最初`命運似乎也沒有安排德彪西從事音樂,因為父母及祖輩都沒有顯著的音樂才能,其父母在巴黎西郊 (Saint Germain en Laye, au 38 rue au Pain)經營陶瓷生意。德彪西原來打算從事水手生涯,然而命運又將德彪西推向音樂,一切緣於德彪西教父Achille Arosa, 一位銀行家和藝術收藏家,其教父家住Cannes, 在Cannes幼小的德彪西認識了大海, Corot和印象派畫家;在那開始學習鋼琴,最初從師於Cerutti, 德彪西的音樂天賦真正被發現是得益於Mauté de Fleurville夫人, 一位肖邦的學生, 是她將偉大的浪漫作曲家肖邦對鋼琴的熱愛傳遞給了德彪西。德彪西十分珍惜這個機會,他努力學習,十一歲的時候, 德彪西就考上了巴黎音樂學院。


他於1873年入巴黎音樂學院,在十餘年的學習中一直 是才華出眾的學生,並以大合唱《浪子》獲羅馬獎。後與以馬拉美為首的詩人與 畫家的小團體很接近,以他們的詩歌為歌詞寫作了不少聲樂曲。並根據馬拉美的同名詩歌創作了管弦樂序曲《牧神午後》,還根據比利時詩人梅特林克的同名戲劇創作了歌劇《佩利亞斯與梅麗桑德》。

    他擺脫瓦格納歌劇的影響,創造了具有獨特個性的表現手法。鋼琴創作貫穿了他的一生,早期的 《阿拉伯斯克》、《貝加摩組曲》接近浪漫主義風格;《版麵》、《歡樂島》、兩集《意象集》和 《二十四首前奏曲》則為印象主義的精品。管弦樂曲《夜曲》、《大海》、《伊貝利亞》中都有不少生動的篇章。

    第一次世界大戰期間,他寫過一些對遭受苦難的人民寄予同情的作品,創作風格 也有所改變。此時他已患癌症,於1918年德國進攻巴黎時去世。在三十餘年的創作生涯裏,他形成了 一種被稱為“印象主義”的音樂風格,對歐美各國的音樂產生了很深遠的影響。

    一、德彪西的“夢幻世界” 德彪西這位現代音樂的創始者,開發了任何音樂家都沒有發現過的、奇怪的音的世界。

       德彪西在音樂學院期間,成為某位有錢的俄國貴夫人的一個三重奏中的鋼琴家,並且有機會到 歐洲各地旅行——佛羅倫薩、維也納、威尼斯,而且最後在那個貴夫人的俄羅斯莊園裏住了一段時間。

    在那裏,德彪西遇到一些正在努力從民間音樂中為他們的祖國創造一種民族音樂的俄國作曲家。 德彪西對這些俄國音樂家所使用的,與別國作曲家們所用的大調、小調音階大相徑庭的奇怪音階 非常感興趣,這些音階是建立在狂熱的東方民族的民間音樂基礎之上的。

    一年以後,德彪西回到巴黎音樂學院,並像許多別的法國音樂家們一樣,贏得了羅馬獎而完成了 他的音樂學院課程。但是他寫的音樂與別的音樂家完全不同,他不常使用那些傳統古典音樂中所用的大調 和小調音階。有時,他會回到早期教堂音樂的那些有點古怪的古老調式上去,他還經常使用一種 全音音階。

    我們的大調和小調音階是由七個音組成的,五個全音和兩個半音,而大調與小調音階之間的區別在於 那些半音放在哪裏。在大調音階裏,半音總是處於第三音和第四音,和第七音和第八音(3-4;7-1) 之間。在小調音階裏,其中的一個半音總是在第二音和第三音之間,但是也有幾種不同的小調間音階, 在那裏,第二個半音處在不同的地方。德彪西最喜歡的音階有六個全音而完全沒有半音 (如C、D、E、升F、升G、升A),所以他的旋律聽起來同任何過去的音樂都不一樣,而他的和弦就 更加奇怪。 德彪西正是運用了他所偏愛的全音音階,構築起他與眾不同的“夢幻世界”。

    二、泛音

    德彪西對傳統音樂作了許多大膽革新。之所以隻有他敢這樣做,也許是因為任何一個音樂家都 不曾有過他這樣的一雙敏銳的耳朵:德彪西實際上比一般人聽得見更多的泛音。

    正像一種顏色往往是由一些別的顏色組成的那樣(紫=藍+紅,橙=紅+黃,等等),一個音往往也是 由許多音組合而成的。各種音是由空氣中的各種振動引起的,而正如我們從希臘的單弦琴上看到的 那樣,一個音是高還是低,要看振動有多快。但是,一個音除了第一個或主要的振動之外, 還有一些次要的、共鳴式的振動,正象一塊扔到水裏的石頭引起的不是一個波,而是一圈圈不斷擴展開的 波紋。

    泛音中的第一個和最強的是基音上麵的第五個音,這是德彪西不用助聽器也能聽得見的音。

    假如我們有一架調音調得很準的鋼琴,不出聲地按下一個琴鍵,然後很響地敲擊它上麵或下麵的 第五個音,我們就往往能聽見它作為另一個音的泛音,發出德彪西曾經用耳朵聽得見的效果。

    第二個泛音是原來的音(基音)上麵的第十個音,第三個泛音還要高,但已十分微弱。

    下麵的泛音依此類推。造成不同樂器音色差別的主要原因,就是泛音的不同。一把像小提琴那樣的 樂器,其中的較低的泛音較強,就有一種平滑而圓潤的音質;而一把象小號那樣的樂器,其中較高的泛音 較強,就有一種較為洪亮的音質。

    德彪西建造他那古怪的、非塵世的音樂,用的就是這些在空氣中聽不見其振動的音。他為了讓 所有的人們都聽見,大膽地敲響了那些人們甚至還不知道自己已經聽見了的聲音。由於德彪西 敏感的耳朵,他還在管弦樂隊裏使用各種樂器的不同組合來發出柔和的、閃爍著的音響效果。

    起初人們還被他的音樂所困惑,並且不知道怎樣理解它,但是一旦聽慣了,就會非常喜歡它。 德彪西所創立的這種音樂,就是被後人稱為“印象主義”的音樂。 (文/佚名)

    管弦樂作品:

    3首夜曲:

    雲《Nuages》

    節日《Fetes》

    海妖《Sirenes》

    3首映像(Images):

    基格舞曲(Gigues)

    伊比利亞(lberia)

    春之輪旋曲(Rondes de printemps)

    芭蕾:遊戲(Jeux)

    牧神的午後前奏曲

    大生活費

    宗教舞與世俗舞,豎琴與樂團

    室內樂作品:

    大提琴奏鳴曲,d小調

    弦樂四重奏,g小調

    聲樂作品:

    聯篇歌曲:比利第斯之歌(Chansons de Bilitis)

    歌劇:

    佩利亞與梅麗桑(Pelleas et Meisande)

    鋼琴作品:

    夢(Reverie)

    前奏曲(兩冊)

    兒童天地(The Children's Corner)

    月光(選自《貝加莫》組曲)

    阿拉貝斯克(Arabesques)

    版畫(Estampes)

    其他器樂作品:

    西琳克絲(Syrinx),長笛

    大提琴奏鳴曲第一號,d小調

    小提琴奏鳴曲第三號,g小調








" Le temps de Debussy est aussi celui de Cézanne et de Mallarmé : cet arbre à triple tronc est peut-être l’arbre de la liberté de l’art moderne. "Pierre Boulez

Rien ne destinait Debussy à la musique : ni ses parents, qui tenaient un commerce de porcelaine à Saint Germain en Laye, au 38 rue au Pain et qui le destinaient à la carrière de marin, ni sa famille (ou proches) n’avaient aucun don musical. C’est grâce à son parrain, Achille Arosa, banquier et collectionneur d’art qui habitait Cannes, qu’il découvrit la mer, Corot et la peinture impressionniste, et qu’il prit ses premières leçons de piano avec Cerutti. Mais ses dons musicaux ne furent vraiment découverts que grâce à Mme Mauté de Fleurville, élève de Chopin, qui lui transmit l’amour du piano, l’instrument du grand compositeur romantique.

Les années d’apprentissage – Le Conservatoire (1873-1884)

1873 Debussy est admis au Conservatoire de Paris dans la classe de solfège de Lavignac : maître et disciple s’estimèrent beaucoup mutuellement et échangèrent souvent leurs réflexions sur la musique ou l’enseignement musical. Debussy obtint sa première médaille de solfège en 1876.

1875 Il entre dans la classe de piano de Marmontel, mais là, l’entente fut beaucoup moins sereine : l’élève n’aimait pas trop les exercices (ses progrès pianistiques s’en ressentirent et il ne remportera qu’un 2ème prix de piano en 1877 plus en tant que musicien que virtuose…), mais adorait déchiffrer et préludait souvent les œuvres du grand répertoire par des arpèges ou des accords dont le " baroquisme " épatait son professeur qui se rendait bien compte malgré tout des qualités exceptionnelles de ce disciple récalcitrant (" Ce diable de Debussy n’aime guère le piano, mais il aime bien la musique ").

Debussy n’obtint aucune récompense en harmonie, il se rebellait souvent contre l’enseignement d’Emile Durand, fade, routinier, et parfois à la limite du vulgaire.

1879 Marmontel le recommande à la passionnée égérie russe de Tchaïkovski, Mme Nadedja von Meck, qui était à la recherche d’un pianiste déchiffreur pouvant également assurer l’enseignement musical de ses enfants. Grâce à ses trois séjours d’été) en Russie, prolongés par des voyages en Autriche et en Italie, Debussy sortit de son milieu étroit parisien, s’enrichit sur le plan culturel et fit des rencontres déterminantes : à Venise il rencontre Wagner, à Vienne il entend Tristan pour la première fois, en Russie il découvre les chants tziganes, Moussorgsky et Boris Godounov.

1880 Debussy prouve ses dons naturels d’improvisateur, de transcripteur et de réducteur en remportant dans la classe de Bazille un 1er prix d’accompagnement. C’est à cette époque qu’il entre dans la classe de composition d’Ernest Guiraud et qu’il se lie d’amitié avec lui (l’enseignement de Guiraud, très ouvert, le faisait réfléchir sur son art et sa technique).

1881-83 Rencontre des époux Vasnier, événement capital pour sa culture générale et musicale : Vasnier était un architecte cultivé, grand amateur d’art, qui lui fit connaître le monde de la poésie et de la peinture ; quand à Mme Vasnier, il en fut plus ou moins épris et écrivit pour elle ses premières mélodies (elle était soprano aigu), notamment le premier cycle des Fêtes galantes sur des poèmes de Verlaine et la célèbre Mandoline. Debussy allait souvent les voir dans leur villa de Ville-d’Avray, il y trouvait le calme et un certain raffinement intellectuel nécessaires à son épanouissement. Vasnier l’encouragea fortement à préparer le prix de Rome.

1884 Il remporte le prix de Rome avec sa cantate L’Enfant prodigue, révélant ses dons dramatiques et lyriques ainsi que l'influence (peut-être calculée..) de Massenet. Ce qu’il en dit est assez significatif de son besoin d’indépendance notoire : " Quelqu’un me frappa sur l’épaule et me dit d’une voix haletante : " Vous avez le prix !… " Que l’on me croie ou non, je puis néanmoins affirmer que toute ma joie tomba ! Je vis nettement les ennuis, les tracas qu’apporte fatalement le moindre titre officiel. Au surplus, je sentis que je n’étais plus libre. "

Et Marmontel, souvent agacé par cet élève récalcitrant se souvint de ses facéties dans sa classe de piano : " Ah ! le coquinos ! Il se régalait encore dans ma classe des harmonies de Chopin ! J’ai bien peur qu’il ne les trouve plus assez salées… "

La construction d’un langage musical propre – La vie de bohème (1884-1892)

1884-87 A l’instar de celui de Berlioz, le séjour à la villa Médicis fut très mal vécu par Debussy : il s’ennuie, il trouve l’atmosphère guindée irrespirable et ses camarades musiciens, peintres ou sculpteurs grossiers… Il y composera Zuleïma Diane au bois et le Printemps, œuvres plus ou moins terminées, qui ne satisfont ni Debussy, ni l’Institut. Les rapports de l’Académie des Beaux-Arts sont très éloquents : " Monsieur Debussy semble tourmenté du désir de faire du bizarre, de l’incompréhensible, de l’inexécutable "… La cantate la Damoiselle élue, d’après Rossetti, reste la seule œuvre achevée de la période romaine, préfigurant pourtant Pelléas par certaines harmonies et couleurs orchestrales.

1887-89 Il revient à Paris et se lie avec la belle Gabrielle Dupont, dite Gaby, qui fait vivre le ménage de ses maigres revenus. Il fait la connaissance de Mallarmé et de ses célèbres " mardis " dans son appartement de la rue de Rome. Mallarmé, ainsi que tous les symbolistes de l’époque, adorait Wagner et Debussy ne faillit pas à cet engouement pour le maître de Bayreuth : il fit deux voyages à Bayreuth en 1888 et 1889, y entendit Parsifal Tristan et Les Maîtres chanteurs et en revint " follement wagnérien ". En 1889, il découvre la musique d’Extrême-Orient à l’Exposition universelle et lit la partition de Boris Godounov que Saint-Saëns avait rapportée de Russie. Toutes ces influences furent profondes, même si les productions qui suivirent montrent un style déjà très personnel : aparaissent pour piano et voix les Ariettes oubliées d’après Verlaine et les Cinq Poèmes de Baudelaire où l’on sent la présence permanente de Wagner mais de façon contradictoire, et dont le Jet d’eau en est le point culminant. Après cette œuvre, Debussy se sentira libéré de l’influence trop pesante de Wagner et pourra se tourner vers d’autres horizons.

1890 Debussy fait la connaissance de Satie qui l’influencera peut-être occasionnellement, mais il ne faut pas attribuer à Satie la découverte d’un vocabulaire harmonique, seul, Debussy sut le porter à un haut degré de raffinement.

Les premiers chefs-d’œuvre – L’enfantement de Pelléas (1892-1902)

1893 Debussy compose son Quatuor à cordes, œuvre déjà très personnelle et dont le ton, volubile et changeant, n’obéissait plus aux schémas traditionnels viennois ; Debussy, plus proche de César Franck (notamment dans l’andantino), unifie les 4 mouvements classiques par un thème principal et crée une harmonie et une écriture instrumentale d’essence toute nouvelle. L’accueil du public à la première audition (par le Quatuor Ysaye le 29 décembre) fut plutôt réticent ; Paul Dukas par contre fut plus enthousiaste : " Mr Debussy se complaît particulièrement aux successions d’accords étoffés, aux dissonances sans crudité, plus harmonieuses en leur complication que les consonances mêmes… ".

1893-94 Le 22 décembre 1894, la première audition du Prélude à l’après-midi d’un faune s’avère triomphale (l’œuvre fut bissée) ; composé entre 1892 et 1894, ce premier chef-d’œuvre incontesté révèle le poète moderne de la musique : invention d’une rythmique, d’une harmonie appropriées, souplesse et liberté de l’expression, légèreté et délicatesse des timbres, orchestration arachnéenne et colorée propre à Debussy qui va mettre en valeur certains instruments (flûte, cor ou harpe). Et surtout Paul Dukas résumera ainsi l’essentiel de l’écriture debussyste : " L’idée engendre la forme ". Notons la réaction enthousiaste de l’inspirateur de l’œuvre, Mallarmé, qui remerciera le jeune compositeur en un poème :

" Sylvain d’haleine première
Si la flûte a réussi,
Ouïs toute la lumière
Qu’y soufflera Debussy. "

Le 17 mai 1893, Debussy voit au théâtre des Bouffes parisiens la pièce de Maeterlinck, Pelléas et Mélisande : il en fut vivement impressionné, comme tous les jeunes intellectuels d’alors fortement intéressés par le symbolisme. Encouragé par ses amis, il décida de la mettre en musique et pour cela alla voir Maeterlinck à Gand en novembre ; voici ce qu’il dit du poète belge : " à propos de Pelléas, il me donne toute autorisation pour des coupures… Maintenant au point de vue musique, il dit n’y rien comprendre, et il va dans une symphonie de Beethoven comme un aveugle dans un musée… ".
Debussy se met au travail et terminera une première version de l'œuvre vers 1896 ; en fait, il y travaillera dix ans.

1897-99 Il écrit les Trois Chansons de Bilitis sur des poèmes de Pierre Louÿs, équilibre habile entre la prosodie et le chant pur et qui témoigne de son amour pour la voix ; composition à cette époque des Nocturnes (Nuages, Fêtes et Sirènes) : inspirée par la peinture de Whistler, cette œuvre maîtresse sort définitivement des schémas symphoniques traditionnels. L’harmonie et la couleur instrumentale forment un ensemble parfaitement homogène dont la fraîcheur et la beauté nous ravissent toujours.
Debussy nous éclaire lui-même sur la création artistique d’une époque : " Le titre Nocturnes veut prendre ici un sens plus général et surtout plus décoratif. Il ne s’agit donc pas de la forme habituelle d’un nocturne mais de tout ce que ce mot contient d’impressions et de lumières spéciales. Nuages : c’est l’aspect immuable du ciel avec la marche lente et mélancolique des nuages finissant dans une agonie de gris, doucement teintée de blanc. Fêtes : c’est le mouvement, le rythme dansant de l’atmosphère, avec des éclats de lumières brusques, … de poussières lumineuses participant à un rythme total. Sirènes : c’est la mer et son rythme innombrable, puis, parmi les vagues argentées de la lune, s’entend, rit et passe le chant mystérieux des sirènes. "

Matériellement et affectivement, notons que ces années 1897-99 furent difficiles pour Debussy : la meilleure amie de Gaby, Lily Texier, employée dans une maison de couture, devient sa femme le 19 octobre 1899 (Gaby tentera de se suicider).

1900 Debussy commence à être recherché, il fréquente les cafés élégants, rencontre des personnalités telles que Léon Daudet, Reynaldo Hahn, Marcel Proust… Sa situation matérielle s’améliore grâce à sa collaboration à la Revue blanche : avec Monsieur Croche antidilettante, recueil de ses articles critiques, il prouve sa verve impitoyable et un anticonformisme qui ne date pas d’hier…

1902 L’année de Pelléas

Depuis longtemps, les amis de Debussy avaient essayé de faire accepter Pelléas par un directeur de théâtre, en vain. Ce n’est qu’en 1898 qu’André Messager parvint à convaincre Albert Carré, le directeur de l’Opéra-Comique. Mais une brouille éclata entre Maeterlinck et Debussy : Maeterlinck réservait le rôle de Mélisande à sa femme, Georgette Leblanc, alors que Debussy souhaitait confier le rôle à une écossaise, Mary Garden. Maeterlinck, furieux, lui enleva son autorisation, intenta même un procès, mais Debussy gagna. Pelléas put enfin être représenté le 30 avril 1902, mais dans une ambiance des plus houleuses créée par Maeterlinck et ses amis (on en vint même aux mains…). Messager, qui dirigeait l’œuvre, garda son sang froid et l’œuvre put être terminée. La critique ne comprit rien à ce chef-d’œuvre et témoigna de sa bêtise et de son incompétence ; Camille Bellaigue, camarade de Debussy au Conservatoire de Paris trouve que Pelléas " fait peu de bruit ", mais qu’il s’agit " d’un vilain petit bruit "… Toutefois la deuxième représentation fut un triomphe. Debussy devient un compositeur célèbre et reconnu par ses pairs.

Pelléas et Mélisande est unique dans l’histoire de l’opéra moderne : en totale opposition avec Wagner, l’écriture vocale procède du récitatif mélodique, et est discrètement soutenue par l’orchestre.
" Au théâtre de musique on chante trop. Il faudrait chanter quand cela en vaut la peine, et réserver les accents pathétiques…Rien ne doit ralentir la marche du drame : tout développement musical que les mots n’appellent pas est une faute… ". D’ailleurs Debussy ne modifie que très peu le texte de Maeterlinck, il met en musique (dans le vrai sens du terme) et demeure très attaché aux symboles que les mots suscitent (l’eau, la forêt, la chevelure…).

Pour le piano (1902-1912)

Debussy avait déjà écrit pour le piano (2 Arabesques, la Suite bergamasque, Clair de lune, Pour le piano…), mais sa conception nouvelle de l’utilisation du piano trouve son apogée à cette époque : apparaissent les Estampes (1903), Masques et L’Isle joyeuse (1905), les 2 recueils d’Images (1905-07), Children’s Corner (1906-08). Avec les 2 livres de Préludes (1909-12) aux titres évocateurs (Voiles, Le vent dans la plaine, Des pas sur la neige, Brouillards, La terrasse des audiences au clair de lune…), notons que c’est la musique qui génère le titre et non le contraire ; Debussy prouve une fois de plus, et notamment dans ses 24 Préludes, que la couleur et les thèmes musicaux priment ainsi que parfois une grande audace harmonique. Il n’ira pas plus loin dans l’écriture pianistique ; la recherche des sons, la priorité donnée aux timbres et aux couleurs, les harmonies complexes, les rythmes, la variété et la fluidité des évocations sonores font de ces pièces des monuments fondateurs de la littérature pianistique du 20ème siècle.

En 1903, Debussy fait la connaissance d’Emma Bardac, femme belle, brillante, musicienne. Abandonnant sa femme Lily, il la rejoint à Pourville en 1904. Le scandale va éclater et provoquer sa fuite à Jersey, puis à Dieppe, où il terminera La Mer. Après avoir divorcé tous les deux, Emma (redevenue Emma Moyse) et Debussy se marièrent en 1905. Désormais Debussy vécut une vie tranquille et à l’abri du besoin square du Bois-de-Boulogne où le 30 octobre 1905 naquit sa fille chérie, dite Chouchou (pour qui il écrira Children’s Corner). Pelléas triomphe dans le monde entier, le grand compositeur français a atteint la célébrité.

Autres chefs-d’œuvre (1904-1912)

1904-05 Debussy compose un poème symphonique, La Mer, en 3 parties : De l’aube à midi sur la mer, Jeux de vagues, Dialogue du vent et de la mer. Cette fois-là, la musique illustre à merveille les titres, les couleurs orchestrales, sans cesse changeantes, se meuvent dans une structure musicale riche, la conception des timbres y est audacieuse et très nouvelle. On peut dire que La Mer fait partie, peut être avec Jeux, des œuvres visionnaires de Debussy. Il écrit aussi de nouveaux recueils de mélodies, Trois chansons de France, la seconde série des Fêtes Galantes, le Promenoir des deux amants (1904-10), d’un style parfois dépouillé.

1906-12 Les Images pour orchestre consacrées à l’Ecosse pour Gigues, à l’Espagne pour Iberia, et à la France pour Rondes de printemps restent encore peu jouées, sauf Iberia qui brille par sa couleur orchestrale (notamment dans les Parfums de la nuit, chef-d’œuvre d’évocation).

1910-11 Diaghilev demande à Debussy de collaborer avec Gabriele d’Annunzio à une œuvre sur le thème de Saint Sébastien (avec Ida Rubinstein comme principale interprète). Le Martyre de Saint Sébastien, composé en 3 mois, fut donné au théâtre du Châtelet le 22 mai 1911. Le succès fut médiocre ; critiquée par l’archevêque de Paris (supportant mal le mélange paganisme-christianisme), l’œuvre souffre d’un manque d’homogénéité, le texte et la musique sont trop disparates. Debussy ne s’en préoccupera plus.

Dernières grandes compositions (1912-1917)

1912-13 Sur un argument et une chorégraphie de Nijinski, Debussy compose un ballet, Jeux, pour la compagnie de Diaghilev sur le thème de la jalousie amoureuse entre deux jeunes filles et un jeune homme. " Apologie plastique de l’homme de 1913 " selon Diaghilev, ce ballet fut représenté pour la première fois le 15 mai 1913 au Théâtre des Champs-Elysées sous la direction de Pierre Monteux, qui dirigera au même endroit le 29 mai Le Sacre du Printemps de Stravinski dont la modernité agressive et scandaleuse oblitérera le raffinement et l’écriture toute aussi moderne de l’œuvre de Debussy. On s’aperçoit aujourd’hui avec le recul que Jeux fait partie des œuvres les plus remarquables de la dernière période de Debussy : parfaitement construite, cette œuvre est pensée pour la danse. Selon Boulez surtout, " Jeux marque l’avènement d’une forme musicale qui, se renouvelant instantanément, implique un mode d’audition non moins instantané. " En 1913, apparaissent les Trois Poèmes de Mallarmé, mélodies qui montrent un Debussy proche de l’atonalité.

1914-15 Debussy continue à signer ses plus belles pages (plus nationaliste depuis le début de la guerre, ennemi de Schönberg, il va les signer " Claude Debussy, musicien français ") : en 1915, il dédie à Chopin ses deux livres d’Etudes pour piano, chefs-d’œuvre de la littérature pianistique.
Ces 12 Etudes traitent de difficultés pianistiques particulières : dans le 1er recueil (Pour les cinq doigts, Pour les tierces, Pour les quartes, etc…), Debussy nous livre les problèmes techniques ;dans le 2ème recueil (Pour les degrés chromatiques, Pour les agréments, etc…), il traite des problèmes de sonorités et d’interprétation. Ces études, exigeant une maîtrise absolue du clavier, réinventent le clavier moderne auquel se référeront les compositeurs contemporains tels Messiaen, Ligeti…

1915 est aussi l’année de En blanc et noir pour 2 pianos, aux couleurs sombres, " Ces morceaux veulent tirer leur couleur, leur émotion du simple piano, tels les " gris " de Vélasquez " en dira Debussy.
1915-17 : il envisage 6 sonates dans l’esprit français du 18ème siècle ; seulement 3 Sonates verront le jour : celle pour piano et violoncelle est la plus libre et la plus fantaisiste ; celle pour flûte, alto et harpe est peut être la plus élaborée avec un grand raffinement des sonorités ; quand à celle pour piano et violon de 1917, elle est très prisée des musiciens et du public. Debussy aura du mal à la terminer car il était déjà très malade.
Dès 1910, Debussy souffrait en effet d’un cancer au colon dont l’évolution fut lente et douloureuse. C’est en 1917 qu’il parut en public pour la dernière fois, en créant avec Gaston Poulet sa sonate pour piano et violon.
" Claude de France " s’éteint le 25 mars 1918 dans un Paris encore en guerre ; il fut enterré au cimetière du Père Lachaise le 28 mars et peu de gens, à part ses proches, s’aperçurent qu’il perdait un immense musicien dont la modernité allait influencer toute la musique du 20ème siècle.
Dès l’apparition du Prélude à l’après-midi d’un faune, Debussy est lui-même. On a toujours exagéré l’importance des influences musicales subies par lui. Certes, Moussorgski jouera un rôle de révélateur avec Boris, et il ne faut pas sous-estimer son intérêt pour la musique de Wagner, Parsifal notamment (les leitmotives de ce dernier ont bien laissé quelques traces dans Pelléas), mais la musique de Wagner vient de Beethoven et va vers celle de Schönberg, tandis que le chemin que trace Debussy est unique. Il dira à l’époque de Pelléas : " Il fallait désormais chercher après Wagner et non d’après Wagner. ", ou encore : " Wagner, si l’on peut s’exprimer avec un peu de la grandiloquence qui lui convient, fut un beau coucher de soleil que l’on a pris pour une aurore… " Car il était très opposé à la " ferblanterie " de la Tétralogie.
Debussy inove : grâce à sa rencontre avec les musiques d’Extrême-Orient, il enrichit les rythmes et les timbres en employant la gamme pentatonique orientale pour les évocations exotiques et crée la gamme par tons entiers (écoutons Voiles, par exemple) ; voulant créer son vocabulaire et sa forme, il bouleverse le temps musical (une certaine mouvance apparaît dans la musique), suspend la tonalité ; il dira des accords : " D’où viennent-ils ? Où vont-ils ? Faut-il absolument le savoir ? Ecoutez, cela suffit. " L’importance du timbre et de la couleur musicale ainsi que la souplesse rythmique et l’infinie mobilité du tempo forment la caractéristique essentielle de l’œuvre de Debussy.
De nombreux compositeurs se réclament de l’esthétique debussyste, de Messiaen à Boulez en passant par Dutilleux ou Ligeti.
" La musique française, c’est la clarté, l’élégance, la déclamation simple et naturelle ; la musique française veut avant tout, faire plaisir. Couperin, Rameau, voilà de vrais Français ! Cet animal de Gluck a tout gâté. A-t-il été assez ennuyeux ! assez pédant ! assez boursouflé ! Son succès me paraît inconcevable. Et on l’a pris pour modèle, on a voulu l’imiter ! Quelle aberration ! Jamais il n’est aimable, cet homme ! Je ne connais qu’un autre musicien aussi insupportable que lui, c’est Wagner !… "
Claude Debussy

CATALOGUE DES ŒUVRES PRINCIPALES

Œuvres chorales et dramatiques
La Damoiselle élue, cantate (1887-89)
Pelléas et Mélisande, opéra (1893-02)
Deux Chansons de Charles d’Orléans, pour chœur sans accompagnement (1898)
Le Martyre de Saint Sébastien, pour soprano, 2 contraltos, chœur et orchestre (1910-11)
Jeux, ballet (1912-13)
Musique pour orchestre
Prélude à l’après-midi d’un faune (1892-94)
Nocturnes (1897-99)
La Mer (1904-05)
Images (1906-12)
Musique de chambre
Quatuor à cordes (1893)
Chansons de Bilitis, pour 2 flûtes, 2 harpes et célesta (1900)
Sonate pour violoncelle et piano (1915)
Sonate pour flûte, alto et harpe (1915)
Sonate pour violon et piano (1916-17)
Environs 80 Mélodies
sur des poèmes de Paul Verlaine (Mandoline, Ariettes oubliées, Fêtes galantes…)
sur des poèmes de Leconte de Lisle
sur des poèmes de Théophile Gautier
Cinq Poèmes de Baudelaire
sur des poèmes de Pierre Louÿs (Trois Chansons de Bilitis)
sur des poèmes de Charles d’Orléans (Trois Chansons de France)
sur des poèmes de Tristan Lhermite (3 Chansons de France, Le Promenoir des deux amants)
Trois Ballades de François Villon
Trois Poèmes de Stéphane Mallarmé
Noël des enfants qui n’ont plus de maison
Pour piano seul
Suite bergamasque (1890-05)
Pour le piano (1896-01)
Estampes (1903)
Masques (1904)
L’Isle joyeuse (1904)
Images I (1905) – Images II (1907-08)
Children’s corner (1906-08)
Préludes I (1909-10) – Préludes II(1910-12)
Etudes I et II (1915)
Pour piano à 4 mains
Petite suite (1888-89)
Six Epigraphes antiques (1914)
Pour 2 pianos
En blanc et noir (1915)

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